Henri V de Shakespeare, travail sur le choeur
Le travail du chœur nous fait entrevoir la possibilité d'un peuple constitué de tous les peuples.
Un chœur est un groupe d'êtres, une micro société, une famille, pleine de diversités qui s'entremêlent, qui se connectent, qui s'unissent et glissent les unes dans les autres pour finir par créer l'Être, l'instant dans l'espace où la fusion est faite.
Un chœur est une force en mouvement qui avance telle une flèche, sans plus de personnalité, d'égo, de singularité ou de couleur de peau, mais un seul corps, créateur, animé par le même cœur.
Un chœur est une énergie qui se recompose à partir des origines de la danse en groupe, comme une cérémonie chamanique et limite qui milite pour un message actuel, essentiel et en avance sur son temps.
Le chœur délivre telle une bombe sa dose de vivant.
Un chœur respire sur un seul rythme. Ses pas esquissent un pas qui est celui de tous.
Le chœur, fatigué des mots et des messages, des dogmes et des bavardages, utilise un autre langage, celui du corps. Il se relève de son passé en débris et se reconstruit "en corps" une symphonie.
Écoutez la voix silencieuse des souffles à l'unisson, des frottements de bottes, du choc de la peau sur le cuir des blousons...
Le chœur permet la réconciliation avec l'autre, en étant en même temps un point du tableau, indissociable des autres et, un simple grain de sable, effaçable, merveilleusement remplaçable.
Il est question de la quête de notre réalité et des chances qu'il nous reste, aussi infimes soient-elles pour la façonner.
Délivrer cette vérité, plus que jamais vitale et urgente.
Témoigner de l'heure et de sa gravité.
Le chœur est à lui seul une image poétique pure, celle de la tentative de la résurrection de l'humanité, à nouveau prête pour la révolution et le progrès.
Il est essentiel pour un acteur de prendre le risque de ce rituel qui n'est jamais le même.
Bien qu'il l'ait déjà expérimenté, tout s'est transformé, a migré dans un nouvel ailleurs à explorer...
L'acteur est curieux et valeureux, acharné à émettre de la lumière dans les endroits qui ont stigmatisé l'obscurité.
Il lui faut "des heures de vol" et une pratique constante. Refaire, rejouer, re-taire, retomber, pour mieux s'encrer au sol et toucher à cette abnégation totale de la pensée.
Par cet acte organique et orchestré dans la conscience de s'être effacé, d'être issu et mu par des pulsions et des instincts très anciens, l'acteur danseur redevient quelqu'un aux yeux des spectateurs.
L'ici et maintenant prend une dimension toute puissante car sur ce plateau-là, il n'y a plus d'abris, plus d'apparats, pas de temps pour cela, juste un cri au ventre qui fait l'état des lieux, devant eux!
Le chœur pose enfin et surtout la question de la survie de notre race, il fouille dans les couches anthropologiques de nos destinées où trouver la force de résister.
Ce combat, celui du roi Henri, c'est celui de ceux qui croient à l'impossible, qui croient qu'en guise de cavalcade des armées, la simple tête d'un cheval de bois suffit à galoper.
Ce combat, nous le referons, "nous continuerons à marcher", à lutter, pour exister ensemble et nous relever.
Nous nettoierons à grandes eaux la mort en vue d'écrire par dessus, à l'encre indélébile, un avenir possible.
Tel est le rôle qu'il nous est donné de tenir, afin de faire partie de l'histoire à venir.
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